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Conseil dÉtat (4ème et 5ème sous-sections réunies), décision 5 dicembre 2007 (requête N° 285395): "Port de signes ostentatoires religieux dans les établissements scolaires publics".
(Inédit au recueil Lebon)
Conseil dÉtat
4ème et 5ème sous-sections réunies
M. Stirn, président
M. Philippe Barbat, rapporteur
M. Keller, commissaire du gouvernement
SCP PIWNICA, MOLINIE, avocat(s)
lecture du mercredi 5 décembre 2007
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 septembre et 22 décembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil dEtat, présentés pour M. Gurdial A, représentant son fils mineur Jasvir B, demeurant ... ; M. A demande au Conseil dEtat dannuler larrêt du 19 juillet 2005 par lequel la cour administrative dappel de Paris a rejeté sa requête tendant à lannulation du jugement du 19 avril 2005 du tribunal administratif de Melun rejetant sa demande tendant à lannulation de la décision du 10 décembre 2004 du recteur de lacadémie de Créteil confirmant la mesure dexclusion définitive de Jasvir B du lycée Louise Michel de Bobigny prononcée par le conseil de discipline du lycée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de lhomme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de léducation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Barbat, Auditeur,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;
Considérant quil ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le conseil de discipline du lycée Louise-Michel de Bobigny (Seine Saint Denis), a, lors de sa séance du 5 novembre 2004, prononcé la sanction de lexclusion définitive sans sursis de létablissement de Jasvir B, élève de seconde, pour ne pas avoir respecté la loi du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics ; que, par une décision du 10 décembre 2004, prise après avis de la commission académique dappel, le recteur de lacadémie de Créteil a maintenu cette sanction ; que M. Gurdial A, agissant en qualité de représentant de son fils mineur Jasvir B, demande au Conseil dEtat dannuler larrêt du 19 juillet 2005 par lequel la cour administrative dappel de Paris a rejeté sa requête tendant à lannulation du jugement du 19 avril 2005 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande dannulation de la décision du 10 décembre 2004 ;
Considérant que le moyen tiré de ce que larrêt attaqué naurait pas répondu au moyen tiré de ce que le sous-turban porté au lycée par Jasvir B nest pas un vêtement religieux et nest pas un signe dont le port est interdit dans les lycées publics par larticle L. 1415-1 du code de léducation, manque en fait ;
Considérant quaux termes de larticle L. 141-5-1 du code de léducation issu de la loi du 15 mars 2004 : Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. / Le règlement intérieur rappelle que la mise en oeuvre dune procédure disciplinaire est précédée dun dialogue avec lélève ;
Considérant quil résulte de ces dispositions que, si les élèves des écoles, collèges et lycées publics peuvent porter des signes religieux discrets, sont en revanche interdits, dune part, les signes ou tenues, tels notamment un voile ou un foulard islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui même, manifeste ostensiblement une appartenance religieuse, dautre part, ceux dont le port ne manifeste ostensiblement une appartenance religieuse quen raison du comportement de lélève ;
Considérant quen estimant que le keshi sikh (sous turban), porté par Jasvir B dans lenceinte scolaire, bien quil soit dune dimension plus modeste que le turban traditionnel et de couleur sombre, ne pouvait être qualifié de signe discret et que lintéressé, par le seul port de ce signe, a manifesté ostensiblement son appartenance à la religion sikhe, la cour administrative dappel de Paris na pas fait une inexacte application des dispositions de larticle L. 141-5-1 du code de léducation ;
Considérant quaux termes de larticle 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de lhomme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique (...) la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, lenseignement, les pratiques et laccomplissement des rites. - 2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire lobjet dautres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de lordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés dautrui ; que selon larticle 14 de la même convention : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, lorigine nationale ou sociale, lappartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; que, compte tenu de lintérêt qui sattache au respect du principe de laïcité dans les établissements scolaires publics, la sanction de lexclusion définitive prononcée à légard dun élève qui ne se conforme pas à linterdiction légale du port de signes extérieurs dappartenance religieuse nentraîne pas une atteinte excessive à la liberté de pensée, de conscience et de religion garantie par larticle 9 cité ci dessus ; que ladite sanction, qui vise à assurer le respect du principe de laïcité dans les établissements scolaires publics sans discrimination entre les confessions des élèves, ne méconnaît pas non plus le principe de non discrimination édicté par les stipulations de larticle 14 cité ci dessus ; que dès lors, en jugeant que, la décision attaquée ne méconnaissait pas les articles 9 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de lhomme et des libertés fondamentales, la cour administrative dappel de Paris na commis aucune erreur de droit ;
Considérant que les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait constitutive dune discrimination à légard de la minorité nationale que formerait la communauté sikhe de France, contraire à larticle 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de lhomme et des libertés fondamentales et dune violation de larticle 8 de la même convention, sont nouveaux en cassation et ne sont donc pas recevables ;
Considérant quil résulte de ce qui précède que M. Gurdial A nest pas fondé à demander lannulation de larrêt attaqué ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête formée par M. Gurdial A représentant son fils mineur Jasvir B est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Gurdial A et au ministre de léducation nationale.
Copie en sera adressée pour information au recteur de lacadémie de Créteil.